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Paye ton auteur mais seulement quand il est mort

Dans L’express, je découvre l’incroyable histoire du Madoff français, écrit par Jérôme Dupuis et Laurent Léger, qui se lit comme un feuilleton d’un autre temps.

Gérard Lhéritier est l’un des plus gros acheteurs de manuscrits du monde. Les écrits de Kafka, Hugo, Mozart, Einstein, Baudelaire, Gauguin, tout y passe. Ses pièces maîtresses, désormais classées trésors nationaux : le rouleau manuscrit des 120 journées de Sodome du marquis de Sade et les premier et deuxième Manifeste(s) du surréalisme d’André Breton ou bien encore le manuscrit d’Ursule Mirouët d’Honoré de Balzac. Il a constitué une collection de 130 000 pièces originales, mais tous ces manuscrits ne lui appartiennent pas vraiment. Il les a revendus en effet par le biais de sa société Aristophil, qui proposait à 18 000 clients d’acheter des manuscrits grâce à des conventions d’indivision, en promettant à ses épargnants de les racheter avec des intérêts faramineux, 40% sur cinq ans.

« Le 18 novembre 2014 au matin, écrit Jérôme Dupuis, cette folle fuite en avant va s’arrêter brutalement. La police judiciaire perquisitionne les locaux d’Aristophil et la villa niçoise de Gérard Lhéritier. La société est mise en liquidation. L’hôtel particulier à Paris est saisi (on découvrira qu’il était presque entièrement hypothéqué). Gérard Lhéritier, sa fille, Jean-Claude Vrain et quelques autres comparses sont mis en examen pour escroquerie en bande organisée. On évalue le préjudice des 18 000 épargnants à près de 1 milliard d’euros. »

Jérôme Dupuis raconte de vive voix son enquête, avec Laurent Léger, sur Gérard Lhéritier, ses amis, ses obligés, ses clients et ses victimes :

Le malaise au moment de découvrir l’annonce de la vente aux enchères qui a eu lieu dimanche 4 novembre à Fontainebleau avec plus de 140 lettres écrites par de grands noms de la littérature française : Rimbaud, Zola ou encore Proust.

L’expert de cette vente n’est autre qu’Alain Nicolas, l’un des principaux fournisseurs du temps de la splendeur d’Aristophil, comme le rappellent les auteurs de l’article de L’Express.

Crédit : JACQUES DEMARTHON / AFP

Une lettre de jeunesse de Charles Baudelaire annonçant son intention de se suicider s’est vendue dimanche à 234.000 euros, trois fois le prix estimé, lors des enchères par la maison Osenat de missives de l’auteur des Fleurs du mal. Cette lettre de Baudelaire, datée de juin 1845, à l’adresse de sa maîtresse Jeanne Duval, était estimée entre 60.000 et 80.000 euros. Elle fera désormais partie d’une collection privée française, a précisé la maison d’enchères.

La spéculation sur les manuscrits considérés en temps de crise comme un placement avantageux et défiscalisé est un repli révélateur et rétrograde au moment où des auteurs viennent de créer la Ligue des Auteurs Professionnels, l’association d’un collectif d’auteurs et une fédération d’organisations, pour sauvegarder le métier et améliorer les conditions de création de tous les auteurs : protection sociale, rémunération, renforcement du droit d’auteur, encadrement par le code du travail, rééquilibrage du rapport auteur/éditeur…


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