La place située entre la Gare de l’Est et le Centre des Recollets, à Paris dans le 10ème arrondissement, a été réaménagée et végétalisée en 2012 et porte depuis le nom de la résistante et femme politique Madeleine Braun, première femme vice-président de l’Assemblée nationale. En 1951, écartée du Parti Communiste, elle s’éloigne de la politique et devient co-directrice avec Louis Aragon des Éditeurs français réunis, où elle publie de nombreux auteurs comme Paul Valéry, Paul Eluard ou Vladimir Maïakovski.
Cet été, la place a été investi par un artiste en herbe qui en a fait son domaine d’expérimentation. Sans juger de l’esthétique de la place après son intervention, il est troublant de remarquer l’indifférence générale qui a accompagnée ses interventions sur un espace qui, même s’il est réduit et a toujours été un lieu sans qualité, en dehors des principaux flux de circulation, îlot de bitume transformé en coin de verdure, rien n’y fait, demeure un endroit ouvert et très visible de la ville. Cet aménagement éphémère révèle en creux qu’un lieu inactif, en marge, est déjà un lieu à l’abandon.
« Et ici le réel – les gens, donnés comme une masse, milliers de mémoires actives se croisant, autrefois dans les fumerolles, aujourd’hui sous le cliquetis des tableaux d’affichage automatiques, tressant de phrases effilochées, condamnées au désordre par la violence impressionniste du lieu. (…) Partout et toujours la gare est comme un terrain vague où n’importe quelle bouture humaine peut prendre et où flotte, mais comme impuissante, une vague rumeur solidaire. »
Jean-Christophe Bailly, Le propre du langage, Seuil, 1997
Expliquer les petites erreurs du réel.
Ce trou sur le trottoir ne présage rien de bon.
Rien d’autre que l’air grisant de l’accélération du rêve.
Tu comprendras plus tard, ne t’en mêle pas.
Comme si nous avions une angoisse de la solitude du lieu.
Quand il n’y aura plus que l’idée de nous.
Son corps était une maison de sable.
Un silence et une solitude toujours aussi intenses.
La frontière entre le ciel et la terre a disparu.
Bien sûr c’est l’histoire d’une chute.
Chacun cherche à échapper à sa solitude, à ses souvenirs, à son passé, à sa folie.
Et quelle part d’imaginaire, de cauchemars, de souvenirs ?
Je prends ses arrivées, ses lignes, et son tourment et ses ombres, je prends.
La présence au bout des doigts qui se dérobe.
Dans ma défaite de chaque jour, une organisation, un dispositif.
Mais avec ce doute constant : cela vaut-il la peine ?