Chaque mois, un film d’une demie heure environ, regroupant l’ensemble des images prises au fil des jours, le mois précédent, et le texte qui s’écrit en creux.
« Une sorte de palimpseste, dans lequel doivent transparaître les traces - ténues mais non déchiffrables - de l’écriture “préalable” ».
Jorge Borges, Fictions
On y voit plus clair au lever du jour. On est moins perdu quand on ne sait pas où l’on est que lorsqu’on ne comprend pas où l’on va. Qui marche dans la direction opposée est perdu. La trajectoire de l’heure n’est pas entièrement disséminée à l’intérieur des synapses brûlées de la mémoire. Un son est un son parce qu’il y en a d’autres. Le jour répand son mystère, la poussière de son ombre, par-delà le couchant.
Je prends, je garde et je conserve. Il faut le sens de la mémoire, il faut transcender le temps. Se laisser croire qu’il y a peut-être au-delà du cadre de cette fenêtre quelqu’un quelque part. Un signe sans force pour des champs de forces. Un refrain lancinant vient scander cette litanie démente. Les méthodes pour passer clandestinement une frontière sont variées.
L’écriture est liée à l’infini. L’écriture est un fragment infime de l’errance. Appeler surtout pour que rien ne vienne. Chercher sans cesse un point d’appui. Écouter sa propre respiration qui n’est pas vraiment à soi à la fin. Tout ici respire d’un mouvement antérieur plutôt qu’intérieur. L’écriture se rêve simple captation, saisie de consciences diffractées. Comme une sorte de crépuscule ou de purgatoire n’ouvrant à rien d’autre qu’à la nuit et à la disparition. Et le jour, un labyrinthe impalpable. Et ce qu’on appelle la réalité, c’est ce qu’on codifie.
Viens ici. Une autre fois, à un autre moment. Mesure le jeu des mots et du souffle, enfin. Le poème existe à l’état de bribes d’un problématique journal intime. On perçoit dans la parole des sonorités arbitraires qui persécutent le sens. Éprouver la vibration jusque dans les juxtapositions incongrues, les effets de symétrie décentrée, à travers des poèmes en pièces détaillées. Ce sont les plans qui nous perdent. Je suis une frontière qui n’existe pas.