SAN GIMINIANO, Toscana (1972)
Du temps où nous dispersions la lumière neutre, t’en souviens-tu, sur l’une ou l’autre de ces crêtes grises, l’aveu de la chose à venir, déni, grain levé, grappe, rafale, strie...
Il t’a fallu dénaître, depuis, renvoyer la verte indifférence, réconcilier l’intelligence de la brume et la première imprécision des hymnes...
Tes départs n’ont rien changé.
Mais que cela te soit compté quand tu t’éloigneras dans l’âpreté nouvelle – le reflet du poison sur ton masque.
KILLARNEY, Co.Kerry (1974)
Voix d’enfant, jardin à l’abandon, joie d’oublier – mais qui nous y trouvera ? La rumeur et l’aveu, peuvent-ils comprendre que tu songes à les confonde en une seule et même ombre ?
Une enquête, oui, sur la dégradation du réel, et sur sa reconquête : rassembler, compléter la mosaïque, visage entrevu au miroir, trop proche déjà de qui, rendant son reflet, le convoitait malgré tout...
Tu nous précèdes avec tes mots, appâts mués en gains, ce qui fut dévorant ce qui est... Que nous est-il resté – et à toi ? Rien que des voix qui ne se peuvent dompter, démêler, celle-ci, cette autre, implorant, voici mon histoire, et tu leur demande, avec le même entêtement qu’elles mettent à t’écarteler : quelle est la vôtre, donc, quelle est la mienne ?
Que tu ais voulu intervenir dans l’Histoire, c’est cela qui n’a pas de sens. Elle ne s’est point arrêtée et, tu le sais, elle persévère, comme le soleil du loch, cette lumière stricte, sans poussière, froide et familière de l’ombre, qui soudain modela la vallée, miroir sous l’eau qu’aucun pont n’enjambait, aucun chiffre, aucun fiel, aucune fable...
C’est l’heure : tu ne détourne pas l’obscur, ne franchis pas le seuil, le convive de pierre ne vient pas te chercher, pas un fief de l’énigme n’est rendu. C’est toi qui toi-même t’arraches, à peine éraillé par le souvenir, tel cet appel qu’on ne lance qu’une fois, jusqu’à ce qu’un autre le redécouvre, le reprenne, et s’en défasse...