
Tu as le temps encore toi le temps de vivre le temps de t’arrêter sur le temps de le laisser prendre toute la place du moment ?
Séverine Daucourt, Poudreuse, 2025
La solution dans la continuité
Quand on revient de voyage, même s’il n’a pas été long, ça ne va jamais tout seul. Des situations où tout bascule, tout à coup. Sur son visage, cette même expression indéchiffrable. Toujours à sauver les apparences d’une manière ou d’une autre. Ce n’est pas désagréable d’être ici. Le mot fait advenir le sens. La solution dans la continuité. Ils scintillent, à chaque instant ils manquent se désintégrer sous vos yeux, sont déjà des silhouettes sur leur pellicule. Quelque chose d’énorme va advenir, sans que l’on sache quand, ni où, ni même comment. Quelque chose d’énorme et de terriblement banal. La musique et les lumières, comme une barque en plein rêve, enveloppés, tous ensemble, et sans oser en descendre. Dans la même déferlante d’émotions que moi, la même attente, la même excitation, la même surprise, le même soulagement. Un visage intense du temps passé, intense, étrange, aux yeux pleins de tristesse. Il dit que ma tristesse n’est pas un reproche. La distance des années serait-elle aussi puissante que ça ? En un sens, un contour et un blanc. Tel est le mystère. Je cherche et je ne trouve pas. Il est presque devenu impossible de sentir et de désirer par soi-même. Il y a toutes ces bribes de souvenirs qui me reviennent dans les circonstances les plus improbables. Envie d’être ailleurs, mais où ? Pour faire quoi ? Pas dans ses caches habituelles, pas plus dans les bibliothèques qu’entre les mains d’un de ses amis. Remis dans le droit sens des phrases, soudain je m’affale. Plus perdu que jamais. Dans la situation d’une partition sans musique. Mais on peut raconter les choses autrement. Sans respecter l’attente, le temps long des preuves et de l’affection partagée. Voir cette inquiétude reflétée dans les voix et les regards. Là où s’est arrêté le temps, là où il nous manque pour avancer. Il semblerait qu’on ne soit plus pressé de rien lorsqu’on est. Capable de lire dans les blancs et les trous du texte, entre les lignes, dans le silence, ses aveuglements. Les entrailles, le reflet du cosmos, l’origine.