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Les lignes de désir

Une trouvaille : la visualisation du canon 1 à 2, dit « canon cancrizans » (c’est-à-dire en crabe), issu de L’Offrande musicale, de Jean-Sébastien Bach, sous forme de ruban de Möbius. En effet, sur Parcours étranges on découvre que « le manuscrit montre une seule portée dont le début est joint avec la fin. Cet espace est topologiquement équivalent à un fibré en droite sur le cercle, connu sous le nom de ruban de Möbius. L’exécution simultanée des deux chemins d’aller et retour donne lieu à deux voix, dont la symétrie détermine une évolution réversible. Un univers musical est construit et puis “déconstruit” vers le silence. »

Tout reprendre à partir d’ici. À contre-courant du paysage. Ce qui emplit la pièce, résonne, revient, rebondit. Ils viennent revoir ce qu’ils n’ont jamais cessé de voir. Ils savent introduire les couleurs nécessaires au feu. Il en faut si peu pour rejoindre la couleur. L’étonnement devant l’étendue. Un bruit paisible, régulier, monotone. Et l’impression de voir battre son cœur. Comme un ultime point d’appui. Rester en place, sur place. C’était il y a longtemps.

Le dehors intrigue. C’est toujours devant un mur. Cela se prépare lentement. Ma tête ne retient plus le temps. Dans un vide. L’œil guette un sens que rien n’approche. Quelque chose que l’œil ignore. Le paysage, une passion vide. Beaucoup plus qu’une mémoire. Des secousses, l’impossible mouvement souple que le jour retient. C’est comme une perte d’équilibre. Hors du sens le temps d’un frôlement. Le corps se glisse dans l’attente. Le détail agrandi se verra mieux. Vaut-il mieux retenir son souffle ?

Les lignes de désir sont des passages coupant à travers parcs et espaces verts, visibles sous forme de pistes de terre mal dégrossies ou chemins de chèvres marqués dans le paysage à mesure d’un piétinement journalier. Tracées par chacun dans une volonté d’arriver plus vite à destination, ou simplement par curiosité, ces lignes matérialisent la force de transformation et de liberté que peut prendre chaque individu sur l’espace urbain.

Une ligne de désir est un sentier tracé graduellement par érosion suite au passage répété de piétons, cyclistes ou animaux. La présence de lignes de désir en zone urbaine signale un aménagement urbain inapproprié des passages existants.

Les Lignes de désir est un projet de fiction, un entrelacs d’histoires, de promenades sonores et musicales, cartographie poétique de flâneries anciennes, déambulations quotidiennes ou voyages exploratoires, récits de dérives aux creux desquels se dessinent les lignes de désir.

Je tape choix sur la base de données des textes de Liminaire. Je trouve cette phrase : Je suis à la recherche d’une forme d’attente sans fin et qui n’a pas de cause. Quelques lignes plus loin : Comme si ma pensée ne cessait de se former, de se reprendre, comme si elle commençait, ou recommençait, à tout instant : J’ai envie de réfléchir à ce qui m’arrive maintenant. plus loin je trouve la chute de mon pavé de texte : Poursuivre son chemin, comme si de rien n’était. Je poursuis pour combler le trou. Il y avait un choix à faire. À les dire il y a comme un clignotement du sens demandant si cela doit être. Dans un constant glissement ou jeu de rebonds, de relances : ils se rejoignent, se délient, se retrouvent, s’effacent, dans une sorte de chorégraphie très souple, sans ruptures. J’opère de menus changements sur la syntaxe, les temps de la conjugaison. De préférence au présent. Je reprends le texte après y avoir ajouté cet extrait : Je n’entends plus que l’écho multiplié de ma voix. À charge pour eux de les porter. Je finis par me surprendre et m’entendre. Tout a l’air endormi et tranquille.

Je suis à la recherche d’une forme d’attente sans fin et qui n’a pas de cause. Comme si ma pensée ne cessait de se former, de se reprendre, comme si elle commençait, ou recommençait, à tout instant. Je ne sais pas d’où vient la lumière. J’ai envie de réfléchir à ce qui m’arrive maintenant. Pas le temps. Il y a des choix à faire. Des directions à prendre. À les dire il y a comme un clignotement du sens demandant si cela doit être. Dans un constant glissement ou jeu de rebonds, de relances : ils se rejoignent, se délient, se retrouvent, s’effacent, dans une sorte de chorégraphie très souple, sans ruptures. Nous sommes venus par un circuit, en ville, différent. La condition générale du monde est, au contraire, de toute éternité, le chaos. Il ne reste qu’à se mettre au diapason. Je n’entends plus que l’écho multiplié de ma voix. Je finis par me surprendre et m’entendre. Pourtant, à cette heure entre chien et loup, tout a l’air endormi et tranquille. Poursuivre son chemin, comme si de rien n’était.

Il faut trouver la longueur juste des chapitres, ne pas faire trop long. A la lecture j’ajoute de courts passages, modifie sensiblement le texte. Je fais une nouvelle recherche dans la base à partir d’un mot du texte ci-dessus : cause. On ne sait d’où vient la lumière. Et l’on continue ainsi en composant le texte de l’intérieur, en l’augmentant de phrases supplémentaires.

C’est comme une promenade nocturne à travers les rues de Paris. Souvenir des images du film Les mains négatives de Marguerite Duras.


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