Cet atelier figure dans l’ouvrage Comment écrire au quotidien : 365 ateliers d’écriture, édité chez Publie.net en version numérique et imprimée : 456 pages, 24€ / 5,99€.
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Proposition d’écriture :
Peut-on saisir, avec des mots, non pas ce que dit la musique, si tant est qu’elle dit quelque chose mais ce qu’elle suscite au fond de nous : douleur, bonheur, méditation tranquille, oubli de nos limites ? Il existe un ordre, une beauté cachée, un monde sous le monde. Ce mystère qui alerte le veilleur ne demande qu’à se révéler par le verbe. Plonger dans le gouffre troublant de l’émotion. Soulever le voile sur les apparences du réel, ouvrir notre esprit à un monde éclatant de beauté, privilégiant le mystère et l’émotion plutôt que la connaissance ou le sens. On ne résout pas ce mystère, on tente de le déchiffrer en lui donnant une forme musicale.
Son nom secret d’une musique, Philippe Delaveau, éditions Gallimard, 2008.
Présentation du texte :
« Peut-on saisir, avec des mots, non pas ce que dit la musique, si tant est qu’elle dit quelque chose mais ce qu’elle suscite au fond de nous : douleur, bonheur, méditation tranquille, oubli de nos limites … ? Pour Philippe Delaveau qui publie son neuvième recueil, tout est musique dans l’univers, du moindre objet qui nous entoure jusqu’aux ordres complexes. Son nom secret d’une musique est construit en trois parties, comme une sonate et convoque aussi bien Scarlatti que Schubert, Mozart que Messiaen. Ces poèmes cherchent aussi à innover dans la mise en place d’une partition du langage. Recueil de poèmes sur le thème de la musique organisé en trois mouvements : Instables voix du monde ; Son nom secret d’une musique ; Verbe haut. Le poète évoque aussi bien Mozart, Schubert, un récital de piano que la ville de Vienne ou une variation en fa mineur pour orgue.
« J’utilise ce mot intentionnellement car il a été l’objet d’une condamnation ; on le tient pour dépassé, trop XIXe siècle. La réalité souffrante, les mots cœur, âme ou mort sont tenus pour suspects. L’objet de beaucoup de poèmes reste une interrogation du langage sur le langage. Pourtant, quand les gens sont émotionnellement atteints par quelque chose de grave, la poésie les touche encore plus profondément. Lorsque celle-ci ne ment pas, ils comprennent qu’elle formule ce qu’ils vivent profondément, en leur offrant un réenchantement du monde et d’eux-mêmes. »
Philippe Delaveau, qui a reçu le Grand Prix de poésie de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre, n’a pas écrit ce livre en vers mais en prose. Une prose sans pathos, où mots et phrases tremblent et vibrent d’un rythme énigmatique.
Extraits :
LEÇON D’AUTOMNE
« Les oiseaux sur les peupliers de la plaine des notes dispersées, liquides, vagabondes.
Pourtant la symphonie d’un bel après-midi sous les violons des feuilles qui tigrent d’ombre leurs arpèges. Pont de pierre bombé, contrebasse.
Altiers violons de verts. La partition repose Avec la longue élévation de ses sillons jusqu’au sommet de la colline.
Les blanches s’envolent en lançant leurs cris de mer au retour du tracteur puis s’agglutinent, fouillant la terre avec la même obstination. Venues de l’océan, remontant les rivières. « Semailles » serait le titre du morceau, avec les trilles d’un clavecin sous les doigts de Rameau. Leçon d’automne et vieil ivoire rouillé, sombre. Les deux claviers sous la dextérité de l’attaque joyeuse.
JEAN-SÉBASTIEN BACH
Au commencement et à la fin de la phrase, c’est ton visage qui attend vieux maître et ton regard sous la chandelle au grenier – presque aveugle. Avec ces bruits d’enfants nombreux entre querelle et rires dans la maison comme une fugue où se perd le nom dilaté par les voix de musique, de tant de signes sur les cinq traits où ta main s’est posée.
L’été qui a mûri les fruits et l’harmonie du monde
offre un répit sur le gué de l’accord au vaste hiver.
Le fil de soie de la mélodie élabore
un chemin sombre et clair sur les décombres
du thème au préalable inscrit et simple
au blason gris des bémols ou des dièses.
Avant l’épuisement de ses détours et la résolution
sur le clavier d’ivoire de la tonique.
Ici ta main rature de sa plume : Seigneur
si ton Nom est grand et pauvre, mon espérance.
Que la joie qui redescend de la voûte avec les cors
et les voix d’anges. Mais dimanche s’approche.
Il faut dans l’harmonie ingérer l’air et que le souffle
illumine un chemin vrai du cœur au cœur.
Puis un accord résout longuement au point d’orgue
le commencement à la fin de la phrase.
Auteur :
Philippe Delaveau est un écrivain et poète français né en 1950 à Paris. Auteur d’une dizaine de recueils de poèmes, la plupart publiés par les éditions Gallimard, de traductions de l’anglais et de l’espagnol, de nombreux ouvrages réalisés avec ses amis peintres (Baltazar, Bertemès, Cortot, Greder, Hélénon, Laubiès, Pouperon…), Philippe Delaveau a reçu le prix Apollinaire (1989), le prix Max Jacob (1999) et le Grand Prix de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre (2000). Il est membre de l’Académie Mallarmé, du Club des Poètes, Essayistes, Nouvellistes (P.E.N-Club de France) et membre du jury du prix Apollinaire. Philippe Delaveau a été décoré Chevalier des Arts et des Lettres en 2009.
Liens :
Présentation de Philippe Delaveau sur Wikipédia
Article sur l’ouvrage de Philippe Delaveau dans le magazine Prestigium Quelques poèmes sur le site de l’éditeur Luxembourgeois Phi