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Ateliers d’écriture à la Faculté de Lettres de Poitiers

À l’invitation de Stéphane Bikialo, je reviens cette année à la Faculté de Lettres pour assurer une série d’ateliers d’écriture sur le thème du travail, comme je l’avais fait en novembre et décembre 2009 à Sciences Po Poitiers et à la Faculté de Lettres.

Les résultats de l’atelier, et de celui que mène Stéphane Bikialo sur "quel travail voulons nous" suite à l’enquête Radio France, figureront dans l’exposition sur l’écriture du travail qui aura lieu à la Médiathèque de Poitiers, dans le cadre de la manifestation Filmer le travail qui a lieu à Poitiers, du 8 au 13 février 2013.

Deuxième séance :

Un atelier d’écriture (avec lecture et enregistrement sonore) autour de l’ouvrage de Joachim Séné, C’était, mis en ligne le 20 septembre 2011 sur Publie.net, dans la collection Temps Réel.

L’ouvrage est également disponible en version imprimé à la demande sur PubliePapier.

C’était, de Joachim Séné sur PubliePapier de Publie.net

Atelier d’écriture :

Les textes de littérature qui ont le mieux honoré les contradictions propres au monde du travail, et ce qu’il fait émerger de notre humanité nue, sont ceux qui ne poursuivaient pas le travail lui-même, mais bien leur seul principe littéraire.
C’est ce qui fait la force et la nouveauté de ce livre de Joachim Séné. Informaticien, il quitte son travail, il y a un an de cela, pour écrire. Son expérience littéraire se développe via son site joachimesene.fr. Mais les fantômes sont coriaces. Il participe à une belle aventure web d’écriture à contrainte, le Convoi des glossolales . Et c’est dans ce mince billet quotidien, cinq lignes à peine, rarement plus, que toute une année il va revisiter, en temps décalé, un an de son ancien travail salarié dans l’openspace.

Condition moderne du travail : au cœur de la capitale, en vue de la Tour Eiffel, avec la pause clope sur le trottoir et les touillettes de la machine à café. Et pas un travail aux mains noires : le code, les bases de données.
Alors accordons à Joachim Séné qu’avec C’était nous viendrons lire une expérience formelle dérangeante, la netteté de ce qu’on voit, l’abstraction du monde, le quotidien du corps et des paroles, les chefs et le retour chez soi.
Mais à l’inverse, qu’il nous accorde de découvrir, dans ces 53 semaines en 5 fragments, sans jamais dire "je", une mise en écriture résolue, politique et tout aussi coriace, du nouveau visage du monde du travail : un monde sans visage.

Présentation de l’auteur :

Né à Amiens en 1975 suite à une erreur de diagnostic, Joachim Séné trébuche quand on le regarde. D’origines diverses et invraisemblables, fruit d’un programme génétique qu’il ne prend pas la peine de revendiquer, Joachim Séné n’est pas un très bon nageur.

Mais dès fois, il préfère se présenter ainsi : Descendant d’esclaves ou d’esclavagistes selon les branches généalogiques, Joachim Séné a du sang noir sur les mains et dans les veines. Il travaille en région Parisienne, a un site : Fragments, Chutes et Conséquences.

Joachim est l’auteur de cinq livres numériques aux éditions Publie.net. Il écrit quotidiennement sur son blog où l’on peut découvrir une autobiographie originale.

Un extrait du texte de Joachim Séné :

C’était ressentir le temps. Bloc restant des jours aussi lourds qu’il y en avait peu. Le curieux était de prendre conscience de ce tard là seulement maintenant et, aussitôt, ressentir quelque chose de physique, un peu partout dans le corps. Bien sûr, rien que ce poids habituel sur les épaules et la poitrine, mais comme s’il avait pris confiance, contenance, meilleure prise, s’étant nourri de nos infimes retards et errements au long des semaines, ayant grossi de cette manière progressive qui fait qu’on ne sent rien si l’on ne prête pas attention et puis peut-être s’étant retiré la veille au soir après les bières de frais entre collègues – au pic de chaleur n’en pouvant plus – étant revenu le matin, couvercle bruyamment refermé sur nous, prisonniers désormais d’un calendrier dont l’échéance des vacances, plus que celle du projet, nous aidait à rendre possible la construction de l’édifice, sa livraison finale. C’était être sous la multiplication des contraintes, des demandes, des attentes, des arbitraires, des rancœurs, des faux-fuyants, des hypocrisies, des trop-pleins de bonne volonté, des trop-pleins de conscience et vouloir, ici et maintenant, tout lâcher, tout laisser tomber, tout laisser en plan, leur en faire voir à tous qui, vraiment, comptait ici, qui, s’il partait, ferait vraiment tout s’effondrer, sentir ce pouvoir de destruction Hapax immense et vouloir effacer tout le code source, vouloir laisser un virus sur un serveur, vouloir s’en foutre d’être pris et licencié à sec pour faute grave et même s’il faudrait payer après deux ans de prudhommes des sortes d’indemnités à la boîte – supposait-on – vouloir tout casser mais bien sûr ne rien casser, juste vouloir partir, démissionner, claquer la porte et en fait ne pas partir, juste vouloir être tranquille, au moins un peu, ces derniers jours, et ne pas pouvoir non plus, et comprendre aussi combien vite nous serions remplacé, comment, avec du temps, notre passage ici et sa destruction finale seraient effacés, combien nous étions, au fond, tout autant indispensable que si peu irremplaçable.

En complément du premier atelier, j’ai proposé aux étudiants de raconter autrement la situation au travail qu’ils avaient décrite précédemment en s’appuyant sur l’exemple du livre de Joachim Séné C’était en travaillant à cette fois-ci à partir d’un autre de ses magnifiques textes, Hapax dont voici la contrainte d’écriture :

Raconter le monde du travail, le moindre événement au quotidien, cette vie ordinaire, en utilisant un ensemble de mots uniques, sans les répéter une seule fois.

Avec Hapax, Joachim Séné a écrit un texte bref constitué d’exactement 971 mots, tous uniques. En effet, et c’est bien le sens du titre de cet ouvrage, un hapax est un mot dont on n’a pu relever qu’un exemple dans un corpus donné. Ni adverbe, ni auxiliaire ni article répétés. Hapax est donc un texte à contrainte qui raconte une vie marquée d’événements toujours différents, une vie qu’on qualifie d’ordinaire, mais unique. Petit clin d’œil vers Les choses de Georges Perec, bien évidemment. Écriture à contrainte avec pour intention, comme le rappelle François Bon dans sa présentation du texte sur Publie.net, de « casser le visible ou le proche pour en extorquer une représentation inédite. »

Les textes des élèves :



Enregistrements des lectures des textes :
































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