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Séance 275

Cet atelier figure dans l’ouvrage Comment écrire au quotidien : 365 ateliers d’écriture, édité chez Publie.net en version numérique et imprimée : 456 pages, 24€ / 5,99€.

Vous pouvez commander ce livre directement sur la boutique de Publie.net (une manière de soutenir la maison d’édition et ses auteurs) ou en ligne (Amazon Place des libraires, etc.) — et bien évidemment chez votre libraire en lui indiquant l’ISBN 978-2-37177-534-3, distribution Hachette Livre.

Proposition d’écriture :

Écrire de courts poèmes sous la forme d’un photo-reportage. Le regard nourrit l’écriture. Des flashes, des captures, des arrêts sur images. Faire voyager à travers des visions du monde entier et donner à percevoir la rumeur du monde.

Rumeur du monde : clarté d’espace, Annie Salager, L’Act Mem, 2007.

Présentation du texte :

Donner à percevoir en 2007 la Rumeur du monde, ce pourrait être pour Annie Salager une manière de se répéter, tant cet écho de l’universel traverse depuis des années sa poésie. Mais c’est plutôt une fidélité à soi-même, une saisie qui ne se relâche pas, s’amplifie peut-être. Plus élevé que jamais, plus que jamais doué d’ubiquité, le regard nourrit l’écriture. De fait, le lecteur voyage à travers des visions, de Moscou au Népal, entre « strates de banlieue » et « hauts ateliers de la Croix-Rousse. » Les photos reportages du premier chapitre donnent le ton de l’ensemble, leurs flashes marquent l’envol. Liée à « l’humain / qui mourrait s’il savait mesurer sa souffrance », Annie Salager l’est d’une manière singulière. Elle l’est sur les ailes d’un chant qui traverse l’espace. Elle est avec les femmes en Afrique « qui taisent leurs pensées », elle est avec Zhang, avec le paumé des bords de Seine, avec le « berger accroupi » ou l’homme qui pédale et « revoit sous la clameur des mitraillettes / père mère sœurs grand-père désarticulés dans le ciel »

Extrait :

« I

Une neige plus noire que les dents fond dans les bouches serait-ce parce que le fuel n’arrive plus cette année

à Moscou on est tellement occupés

on a déjà marchandé les bottes de fourrure et les peaux

le vent a dévoré les feuilles de bouleaux

il faut dégeler devant les portes les draps de ciel raidis

où les taches vont s’effaçant du bref été sibérien

un peu plus loin les sous-marins atomiques

rouillent dans l’imaginaire des longues veillées

pendant que les gens regardent en papillotant

les villes-lumière dans les volutes du tabac à la télévision

II

Sur ses genoux elle le masse lui insuffle

la pression des rivières avec la terre et le vent

la vigueur des montagnes elle l’oint

de vie avec les rythmes du cosmos

ses mains donnent au tout-petit les énergies

qui vont le préserver du froid des maladies

et qui sait même du mal de solitude

mollets fesses dos luisent de graisse et de plaisir

et quand la mère sourit au passant qui s’attarde

l’air juteux se gonfle d’un parfum d’oranger

même si ce n’est pas un arbre spécialement népalais

III

La femme remonte une calebasse d’eau pour la journée

autour du puits le sable absorbe les gouttes gaspillées

la maman pluie qui la ramènera ? ceux qui violent et envoient

sans pitié aux ancêtres ont brûlé le village et le mil

la femme près du puits les connaît

ce riz n’est pas pour vous foutez le camp d’ici !

– Voisine tu dormais paresseuse ? C’est bien temps de venir au puits !

– Il a mal au ventre mon dernier honte sur moi mon lait est sec

– Allons bois vite l’eau qui donne le lait je n’ai pas soif

Elles taisent leurs pensées et regardent longtemps

le cerne des collines embuées de matin qui vient d’éclater en chaleur »

Présentation de l’auteur :

Annie Salager, poétesse lyonnaise, est l’auteur d’une œuvre abondante et de haute tenue, ouverte par une publication chez Henneuse, La Nuit introuvable, et chez Pierre Seghers, Histoire pour le jour.
Au total, plus de vingt livres et recueils, dont Figures du temps sur une eau courante (Belfont), Terra Nostra (Le Cherche-Midi), Chants (Comp’Act), Marie de Montpellier, roman (Presses du Languedoc).
Dans cette œuvre singulière et discrète, une dizaine de livres d’artistes, enrichis de gravures originales de Paul Hickin, Marc Pessin, Michel Roncerin ou Maxime Préaud.

Lien :

Présentation du livre sur le site de son éditeur L’act Mem


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