Cet atelier figure dans l’ouvrage Comment écrire au quotidien : 365 ateliers d’écriture, édité chez Publie.net en version numérique et imprimée : 456 pages, 24€ / 5,99€.
Vous pouvez commander ce livre directement sur la boutique de Publie.net (une manière de soutenir la maison d’édition et ses auteurs) ou en ligne (Amazon Place des libraires, etc.) — et bien évidemment chez votre libraire en lui indiquant l’ISBN 978-2-37177-534-3, distribution Hachette Livre.
Proposition d’écriture :
De manière générale, l’épiphanie désigne chez James Joyce une révélation subite du sens qui permet au lecteur de comprendre le caractère essentiel de ce qui lui est révélé, contrastant souvent avec la forme triviale de ce qui le lui révèle. Aller à la rencontre de ces moments rares où nous sommes saisis par le sens de la vie, sans forcément en comprendre le sens, mais pour en suivre la direction, ce que François Dominique nomme pour sa part des microfictions.
A wonderful day, François Dominique, (photographies de Bernard Plossu), Le temps qu’il fait, 2004.
Présentation du texte :
« Les petites proses de ce livre sont les dépositaires et les messagers des brefs moments bénis dont l’ordinaire des jours parfois nous gratifie. L’auteur y poursuit une part d’enfance, entre nostalgie et sidération ; il s’y soumet avec confiance au présent de la rencontre. Il nous invite à prendre possession de ces rares instants où nous sommes saisis par le sens de la vie, sans prétendre jamais les réduire à une simple compréhension - qui se dérobe. Comme les photographies de Bernard Plossu, qui leur font écho avec bonheur, chaque texte de ce livre est un instantané, une microfiction dont seul le lecteur peut connaître - pour lui-même - l’issue ou le dénouement. »
Extraits :
1
« 1.
« Le point fixe où m’entraîne la phrase devient le centre d’un nouvel espace ; un labyrinthe se met à tourner autour de ce point ; toute direction est incertaine.
Une phrase qui se veut salvatrice est lancée : “avance une fois pour toutes”. Ce n’est qu’une formule.
Aussitôt prononcée, la phrase avale tous les mots qui entourent et retombe dans le silence dont elle n’aurait pas dû sortir.
Il ne reste rien, absolument rien de cette aventure sinon la nostalgie d’une musique de foire et un vague tournis.”
2.
La canicule ralentit la vie, sauf pour les mouches, taons, guêpes et autres volatiles exaltés par la sueur. Quelques oiseaux tombent en l’air. Peu à peu la journée s’adoucit dans les bois de Saint-Jean-de-Boeuf, un vent léger caresse les branches.
Deux chevreuils miniature débuchant d’un buisson de sureau, un couple de grives piète sur mes mots. J’ai reconnu Robert et Clara Schumann. Brindilles, plumes arrachées, traces de pattes, la musique est ainsi faîte ; le vent n’approuve. Une courte pluie joue du piano de verre sur les feuilles d’un noyer ; c’est une romance des Davidsbünder.
3.
Dans la rue pavée, qui grimpe vers la tour, il y a une porte en pierre, quatre enfants musiciens sculptés dans la pierre ; on voit que les têtes et les mains tenant flûte, viole, tambourin et harpe.
Une femme passe devant la porte, elle pousse un landau. Elle sourit en répétant « mais qu’est-ce qu’il y a, qu’est-ce qu’il y a mon bébé. » Il n’y a personne dans le landau.
Landau, ville allemande, autres drames, autres victimes. Voitures d’enfants à capote formée de deux soufflets pliants. enfant disparu, jamais né, qui le sait ?
4.
Une maison, une chambre, les draps trempés de sueur : vastes fantômes de choses désertées par quelqu’un.
Au ciel ! au ciel ! comme on dirait “au lit” à l’enfant qui tarde à se coucher.
La poussière, le vent, la nuit sont mangés par la nymphe Écho devenue sourde ; Écho dont la bouche ouverte ne profère aucun son.
Dans ce petit corps sans vie la lumière pénétrait par le centre de l’oeil et vous revenait sous forme de regard.
Enfants, poussières, échos : la langue n’y voit goutte en plein jour. Mais elle convoque dans le noir de multiples regards qu’elle fera passer dans le vôtre. »
A wonderful day, François Dominique, (photographies de Bernard Plossu), Le temps qu’il fait, 2004.
Auteur :
François Dominique est né à Paris en 1943. A enseigné le droit public et les sciences politiques, puis dirigé les éditions ’’Ulysse Fin de Siècle’’. Auteur d’Aséroé (P.O.L., 1992), de La musique des morts (Mercure de France 1996) et de Parole donnée (Mercure de France, 1999, il est également essayiste (Maurice Blanchot, premier témoin, Virgile, 2003 et traducteur (György Pietri et Rilke).
Lien :