Ce livre, édité dans un premier temps par D-Fiction, conçu tout d’abord comme une liste de textes paraissant chaque mois sur le site Mélico, a été écrit entre début 2009 et début 2011. Il correspond à une période durant laquelle Anne Savelli s’est trouvée en résidence au CentQuatre, à la Bellevilloise (oloé 4) puis à la bibliothèque Robert Desnos de Montreuil (oloé 12).
Pendant ces deux années, elle a fini d’écrire un livre intitulé Franck (oloé 3, 5 et 13), lui a cherché un éditeur, l’a trouvé ; a entrepris ces oloés, qui de six sont passés à neuf, puis à treize ; entamé la rédaction d’autres textes, dont Dita Kepler, personnage qui se métamorphose en fonction des lieux par lesquels l’auteur passe (oloé 2, 4 et 12) ; ouvert un site avec photographies pour accompagner la parution de Franck (oloé 11 et 13) ; participé à mes ateliers d’écriture à Château-Landon (oloé 6) ; effectué des lectures en public (oloé 7) ; écrit pour le web uniquement (mi-temps). Enfin elle a lu, même si pas assez à son goût, sur papier, sur écran (tous les oloés).
Où lire sur une avenue ? Comment réussir à écrire quand les radios, leurs flashs, leurs tubes ont envahi les cafés, les boutiques et le système nerveux, les couloirs, les entrées, les quais ? Où s’asseoir quand tout nous porte à marcher en pressant le pas, serrer son sac et droit devant rentrer chez soi le plus vite possible ? Où penser ? Où rêver ?
Les oloés, ce seraient ces endroits où lire où écrire (le second ou pouvant se comprendre également, c’est au choix, comme un où sans accent), de ville, de mer, de campagne qui font une brèche, nous y accueillent. L’idée n’est pas de fuir mais plutôt de creuser. Parfois ils seront désignés avec précision, comme c’est le cas pour la chaise-table du CentQuatre trouvée dans un jardin (voir lien) aujourd’hui disparu. Lorsque l’oloé sera privé, on se réservera le droit de rester vague. Des lieux où s’attacher, se concentrer, se laisser distraire ; s’alléger, se lester, jouer des dimensions.
Ces endroits où lire où écrire :
En octobre 2010, dans le cadre d’une résidence en ligne sur le site de Mélico autour de la lecture intitulée C’est en lisant qu’on devient liseron , j’ai notamment demandé à Anne Savelli : Où lis-tu le plus souvent ? Où préfères-tu lire ? Dans quel lieu ? Dans quelle position ?
Je lis pas mal dans le métro. Je lis beaucoup dans mon lit, et beaucoup sur écran, beaucoup sur écran dans mon lit mais c’est quand même assez récent. D’ailleurs il y a deux trois ans, je me disais mais je ne lis plus, qu’est-ce qui se passe, mais en fait j’ai découvert que j’avais l’impression que je ne lisais plus parce que je ne lisais plus que sur écran, et comme je n’ai pas de liseuse, je lis juste sur un ordinateur, à un moment ça me fait mal aux yeux, donc j’ai tendance à lire des trucs assez courts et du coup j’avais l’impression de sauter d’un truc à l’autre sans vraiment me concentrer, ce qui n’était pas forcément le cas en plus. En fait j’aime beaucoup l’alternance. J’aime beaucoup me replonger dans un livre qui est un objet clos auquel je vais entièrement me consacrer, et parallèlement à ça passer, le reste de la journée à lire aussi autre chose. Je lis généralement plusieurs livres à la fois, et ça vient de l’enfance (en général j’en lis entre trois et cinq), mais sur les cinq il y en a forcément un que je vais commencer et puis continuer trois mois après, ce n’est pas de la lecture continue. C’est rare que j’abandonne un livre. Je suis aussi lectrice de manuscrit et c’est une autre façon de lire, mais je considère que c’est du travail, c’est vraiment différent.
Écoutez la pièce sonore et l’interview d’Anne Savelli diffusées en intégralité sur ce site.
Extrait :
« Une chaise, un lit, un canapé, une baignoire, une place de métro, un banc dans un parc, un muret. Un fauteuil à roulettes, une file d’attente, une branche, une buche, un abri de tramway, une marche d’escalier. Une plage, un kiosque, un socle de statue, un recoin de cafétéria. Un bar sans BFM, une borne kilométrique, une alcôve, une serre, un divan de musée. Un pont. Un toit. Un rocher au soleil. Un compartiment vide, un rebord de fenêtre, un parpaing de parking, un tapis enroulé. Un pouf. Une malle. Un siège de WC. Un tas de feuilles sous un arbre, la pelouse des piscines renommée solarium, la salle des pas perdus quand elle n’est pas devenue une galerie marchande. Un cube dans une galerie. Le bas des toboggans. Une cabine d’essayage au fond d’un magasin. Un tabouret de cuisine, un rempart, un trépied, une dune, une clairière, un opéra fermé. Un squat. Une salle de sport en grève. Un coussin, une chauffeuse. Une butte, une balançoire. Un corps nu qu’on aime (ou habillé) (s’y appuyer). Un édredon. Une méridienne.
Un oloé. »
Des Oloés, Anne Savelli, Publie.net, 2020.
Le livre fait aujourd’hui l’objet d’une nouvelle parution aux éditions Publie.net.
Dans cette nouvelle version, vous trouverez quelques différences, parfois des retraits (j’ai supprimé photos et liens), des ajouts surtout : des notes, des propositions pour ceux qui auraient envie de s’y mettre, d’écrire leurs propres oloés et un livret final comprenant des textes de Thierry Beinstingel, Pierre Cohen-Hadria, Virginie Gautier, Maryse Hache, Olivier Hodasava, Christine Jeanney, Pierre Ménard, Juliette Mézenc, Franck Queyraud, Joachim Séné et Lucien Suel.
Le texte que j’ai écrit a été diffusé sur ce site, dans le cadre d’une intervention à la Haute École des Arts du Rhin et à la médiathèque Malraux de Strasbourg : Où lire... Où écrire... à faire :
Faire son trou, trouver sa place, l’endroit où l’on écrit. Prendre le temps de le trouver. Trouver le temps de s’y perdre. Inventer des espaces qui n’existent pas, ou que les autres ne devinent pas, des espaces élastiques, des lieux inédits et accueillants, s’y engouffrer pour écrire, pour quelques heures ou plusieurs jours. Parfois l’espace d’un instant seulement. Des postes d’observation, des moments de calme, de replis et d’ouverture en même temps.
Dans le mouvement (les transports en communs (métro, train, bus)), la déambulation (en ville ou à la campagne).
Dans le repos (un coin de table à la maison, sur son bureau ou quand tout le monde dort, dans le silence nocturne).
À l’intérieur, dans les cafés (chacun son carnet d’adresses), les bibliothèques (privilège du bibliothécaire qui profite de cet espace quand il est ouvert et vivant, avec le public qui le fréquente, mais pour lui seul également, les jours de fermeture).
Dehors, dans les parcs, dans la lecture d’un livre, d’un journal, la contemplation d’une image.
En se réfugiant dans son site pour écrire, et les sites des autres pour les lire.
Et dans le sommeil également.
À la fin de chaque chapitre est associé un atelier d’écriture :
« Faire le portrait d’un homme ou d’une femme qu’on croise régulièrement dans le même lieu, à qui on ne parle jamais, dont on ne sait rien d’autre que ce qu’on en devine mais dont l’absence, si elle survenait, nous inquiéterait. »
« Partir à la découverte d’un lieu sans smartphone ni carte routière, ni guide touristique. Ne pas attendre qu’il fasse beau, ou autre signe favorable, pour s’y rendre. Ne pas choisir un lieu a priori attirant, porteur de rêveries. Tout en attendre. Ne rien espérer. Aller à sa rencontre comme si on tombait amoureux. »
Deux versions du livre :
Vous pouvez commander ce livre directement sur la boutique de Publie.net (une manière de soutenir la maison d’édition et ses auteurs) ou en ligne (Place des libraires, etc.) — et bien évidemment chez votre libraire en lui indiquant l’ISBN 978-2-37177-595-4, distribution Hachette Livre.
numérique : 5,99€
papier : 14€
Joachim Séné propose un site sur lequel il diffuse les oloés du monde.