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Au lieu de se souvenir (Semaine 37 à 40)

Chaque mois, un film d’une demie heure environ, regroupant l’ensemble des images prises au fil des jours, le mois précédent, et le texte qui s’écrit en creux.

« Une sorte de palimpseste, dans lequel doivent transparaître les traces - ténues mais non déchiffrables - de l’écriture “préalable” ».

Jorge Borges, Fictions



Un monde dans lequel les images sont devenues le langage. On vit dans ce monde. Dans l’incessante insatisfaction du trop et du trop peu. Annoncer son départ. Un trou dans sa vie. La forme que ça prend. Il y a d’abord le sentiment vif de ne plus appartenir à une communauté. Une série de portraits faits comme de l’intérieur. L’art n’efface pas la perte, il lui répond. La compassion et la crainte.

Il est seul, celui qui parle. Regardez. Ouvrez les yeux. C’est à peine si on l’entend. Il invente, marchant au hasard. Seul, avec cette sensation d’isolement et d’incertitude. Ce peu d’air suffit. C’est mon seul bien. Comme autant de chances de rendre à jamais présent ce qui paraît perdu. Au milieu de toutes nos invocations, de toutes nos apparitions et de nos chutes. Un dire que sa restriction rend admirable.

Revenir sur ses pas. Reculer. Accumuler pour agrandir, accroître pour élargir. Il y a un trou, un gouffre en lui. Le lien ne se fait pas. Il ne se fait plus. Tout est affaire de montage. Sondage. Mon visage contre le mur. Par quel trouble puis-je me voir emporté loin de moi ? Dans les journaux en période de conflit, de catastrophe naturelle, le même phénomène se répète inlassablement, coïncidence de plusieurs circonstances. De profonds changements dans la perception du monde. Sa prose.

Toute appréhension du dehors disparaît. Rendu plus vivant, plus vibrant, mais aussi plus fragile. Le trou que l’on creuse, langue dans laquelle on s’enterre, dans ses méandres et ses résurgences, bouche pâteuse de mots creux. Entendre des voix multiples et abondantes, temporellement discordantes. Leurs reflets démultiplient leurs incarnations les précisent et les augmentent. Inventer c’est sans doute un bien grand mot.


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