Chaque mois, un film regroupant l’ensemble des images prises au fil des jours, le mois précédent, et le texte qui s’écrit en creux.
« Une sorte de palimpseste, dans lequel doivent transparaître les traces - ténues mais non déchiffrables - de l’écriture “préalable” ».
Jorge Luis Borges, Fictions
Vivre est une chose, découvrir le langage afin d’exprimer la vie en est une autre. Déjà vu dans mes rêves les branches des arbres s’agiter comme des vagues en collision. Les flocons suspendus dans le bleu du ciel se détacher et glisser lentement sur le paysage. C’est encore de la disparition dont il est question. De manière singulière et profonde. On ne peut s’empêcher de souligner, encore, l’absurdité du mot.
On n’est pas seul dans sa tête. Lambeaux de pensée, expressions, bouts de phrases embrouillés en une polyphonie éclatée entremêlée de sons, de musiques, de chansons tronquées comme des souvenirs confus. Une multitude d’occurrences, d’événements, de sensations et de sentiments qui s’entremêlent et s’accueillent les uns les autres. Réveillé par l’eau s’enfuyant dans l’ombre, j’ai bien souvent reproché à la nuit l’absence d’un compagnon.
Les mots rebondissent dans un jaillissement d’étincelles, tel un jouet mécanique soudain venu à la vie, cliquetant et tourbillonnant de bon sens. Épouser son allure, amplifier une destinée commune. Unir ses forces. Mais encore, se souvenir, réévoquer le passé, le faire survenir. Cette merveille étonnante entre toute, douleur parfois. Puisque c’est l’oubli, ramasser les mots dans ma bouche, rien du vent. J’aimerais avoir plus de temps.
Pas exactement le même son, mais une variation, même registre, seules les notes changent. Là même où est leur perte, ils colorent comme à rebours de leur passage le cours de ces histoires où le mot FIN ne laisse jamais en paix. Au point de lui donner la forme d’une liberté prise sur soi, que l’on s’abandonne à suivre, lui-même se sachant un simple nom au puissant générique déroulant.