Chaque mois, un film d’une demie heure environ, regroupant l’ensemble des images prises au fil des jours, le mois précédent, et le texte qui s’écrit en creux.
« Une sorte de palimpseste, dans lequel doivent transparaître les traces - ténues mais non déchiffrables - de l’écriture “préalable” ».
Jorge Borges, Fictions
Le présent est une perpétuelle catastrophe. Une lettre tracée sur le bleu puis effacée, un trait. Le paysage est une page. Un peu de lumière et déjà c’est un visage qui vous regarde. Une page de parchemin, un palimpseste, une surface sensible à toutes sortes d’inscriptions, de marques, de traces. C’est là leur grandeur et leur limite. Leur fragilité. Les choses justes ne se peuvent jamais contrarier entre elles. Sans doute on se trompe d’horizon. Images, signes, traces. J’aimerais maintenant faire un détour.
À l’envers de la marche, je n’ai fait que chercher la place, l’endroit où écrire. C’est le point de vue qui fait le paysage. Voir des oscillations dont les mouvements ne modifient que légèrement l’ordre des choses. Dans une position impossible qui nous invite à disparaître. La parole, mais aussi le geste, épousent l’architecture. Pour laisser l’image à son évidence. La réciproque est aussi vraie.
Comment perdre : c’est la question. Pour mieux comprendre, pour se perdre dans une nouvelle vague. Toutes sortes de lignes, de délimitation, de seuils, de trajectoires. Déplacer juste un peu, mais non transformer. La vivacité, de celle qui s’épuise au moment même où elle s’énonce, et non du bonheur perdu. L’ordre d’aujourd’hui est le désordre de demain.
Visage aimé, visage bien connu de nous surpris dans la foule, dans le va-et-vient de la rue. On dirait que ces détails sont mal synchronisés. Mais non. Juste une part de jeu, une autre façon de se confronter à l’image de soi, avec ses miroirs déformants. Il est tôt, je pars marcher. Il faut d’abord suivre un chemin et c’est toi qui m’accompagne. Et surtout le regard.