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Séance 359

Cet atelier figure dans l’ouvrage Comment écrire au quotidien : 365 ateliers d’écriture, édité chez Publie.net en version numérique et imprimée : 456 pages, 24€ / 5,99€.

Vous pouvez commander ce livre directement sur la boutique de Publie.net (une manière de soutenir la maison d’édition et ses auteurs) ou en ligne (Amazon Place des libraires, etc.) — et bien évidemment chez votre libraire en lui indiquant l’ISBN 978-2-37177-534-3, distribution Hachette Livre.

Proposition d’écriture :

Le poème est un langage qui naît de la destruction d’un langage, de sa réarticulation « autour d’un fond nerveux à haut risque. » Miettes et lambeaux que le langage dans son impossible réconciliation avec le monde tente d’atteindre. Une mise en mots aux allures de mise en pièces, découpes au scalpel dans l’à-vif d’une radicalité qui force l’attention, touche aux limites.

Abruption, Patrick Wateau, Atelier La Feugraie, 2002.

Présentation du texte :

Tout le sens du projet de ce texte de Patrick Wateau est dans son titre. Le mot abruption a deux sens : En médecine il s’agit d’une fracture avec déchirure des fragments. En rhétorique, il s’agit d’une accélération du style par suppression des transitions.

« Cette poésie, écrit Marc Blanchet dans le Matricule des anges, pose d’emblée le désir de s’incarner alors que la parole qui pourrait aider à cette incarnation n’est que miettes et lambeaux. Cette langue souvent aride s’articule comme une marionnette tentant de rassembler ses membres, ne sachant jamais si elle parviendra à son but. Le rythme donné aux vers, cet entrechoquement incessant crée une musicalité rare dans la poésie française qu’on peut rapprocher de certaines musiques contemporaines. »

« Entreprise de démystification, écrit Richard Blin dans un autre numéro du Matricule des Anges, il explore cette expérience abrupte, et par définition inachevable, qu’est souvent la poésie moderne. Car écrire n’est pas seulement tracer des mots, c’est « faire accéder la langue à une dimension encore inconnue », c’est « éprouver la résistance nerveuse de toute phrase, c’est toucher des limites. » Et Patrick Wateau de chercher à éclairer un peu l’obscure algèbre de ce qui est en jeu dans l’activité créatrice, celle tout au moins dans laquelle la nécessité d’écrire devient « impossibilité d’écrire autrement et abandon de tous les possibles pour intensifier cette seule nécessité. » À commencer par ce qui fonde peut-être l’aventure de toute écriture radicale, à savoir la transgression syntaxique. » « Sorte de point zéro ardent, ces poèmes, écrits au scalpel, semblent n’être que des fragments, les corps décharnés d’une écriture vécue, pensée, traversée par des dispositifs coupants ou dislocants, quelque chose comme la résultante de forces soumises à leur plus grande nécessité et agonisant de ce qui les dépasse et les ouvre à un horizon désespérément absent. Comme si, désormais, le poème ne pouvait avoir lieu qu’entre absence et impossible. »

Extrait :

« La vie, longtemps cette posture

et la distance comme une trace

dans l’eau des genoux.

Présent bas inclinant,

talonner le présent.

Comme et combien de temps

si l’on n’a point désespéré de soi.

Si ça été comme grinçant des dents.

À l’endroit de la carte

venir

de l’ancienne forme de venir.

Disparaître

sous le bord décollé.

Porte dehors,

lavée,

ne tenant rien

d’elle-même.

Les inquiétudes de sortie.

Ici, au pas,

une avance d’exil

se demande s’il y a

ou non

dispersion dans le vide.

Forme de vie humaine

en la tremblante du mouton.

Vieillir, perdre la mâchoire comme on sait.

Comment le non déplace le renoncement.

Rien devenu

Tout

pour rien

le fort remous du labyrinthe.

Visage pour la langue,

cela se fait très vite :

trente-deux dents de terre

et de l’air pour carie.

Chemin pour un pilon,

jamais avec la jambe.

Grillage des mots.

Le dessous forme un cendrier. »

Abruption, Patrick Wateau, Atelier La Feugraie, 2002.

Auteur :

Patrick Wateau est un poète et peintre français, né en 1959. Il vit à Rouen. Il a publié chez Æncrages & Co, chez Unes, chez José Corti : Minerve (1999), Bernard Noël ou l’expérience (2001), Docimasie (2001), ainsi qu’à L’Atelier de la Feugraie : Abruption (2002). Parmi ses derniers ouvrages publiés : Hecatonomie, José Corti Éditions, coll. « Domaine français », Paris, 2004. Semen-contra, José Corti Éditions, coll. « En lisant, en écrivant », Paris, 2004. Ingrès, José Corti Éditions, coll. « Domaine français », Paris, 2006 (Prix Antonin Artaud 2007). Sklêros, Éditions Obsidiane, coll. « Les Solitudes », Sens, France, 2007. Humance, ill. Thierry Le Saëc, Éditions de la Canopée, Gornies, France, 2008. Incende noir nominal, Atelier La Feugraie, coll. « L’Allure du chemin », Saint-Pierre-la-Vieille, France, 2008. Essai d’héréticité, José Corti Éditions, coll. « En lisant, en écrivant », Paris, 2008. Recès, ill. Henri Maccheroni, Editions Trames, Barriac, France, 2009. J’ignore ignore, Éditions Grèges, Montpellier, France, 2010

Liens :

Article de Richard Blin dans Le Matricule des Anges sur Semen-contra

Présentation de Patrick Wateau sur le site "Amour du papier"

Bibliographie sur le site de l’encyclopédie en ligne Wikipédia


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